Les Arts Martiaux
29 juillet 2015
Mon expérience
J’ai pratiqué depuis longtemps et pratique encore. J’ai côtoyé d’excellents maîtres et de nombreux pratiquants et en côtoie encore. Avec cette expérience, je pourrais donner un avis péremptoire sur les arts martiaux… Mais j’en suis incapable.
Tout ce que je peux dire ne reflète que mon parcours et ce qu’il m’a apporté, ainsi que ma vision de l’art du combat et comment il transforme l’humain. Mais cela reste personnel et j’ai connu des pratiquants de haut niveau à qui ces disciplines n’avaient apporté qu’un "affutage" de leur physique et une excellente aptitude au combat… C’est déjà beaucoup.
Mon parcours
Ma vision des arts martiaux reflète des tendances qui chez moi étaient très opposées. J’étais et je suis de nature pacifique, mais étant un peu différent des autres dans mes intérêts et raisonnements, très jeune, je me suis heurté à l’hostilité de beaucoup de mes semblables.
Mon père m’a donc inscrit vers 7 ans au judo, à une époque où c’était encore la voie de la souplesse. Puis, par chance, ma mère a connu un maître Shaolin de Kung-Fu, réfugié en France après qu’il ait passé plusieurs années en URSS ayant fui la chine où il avait passé plus de 10 ans de sa vie au monastère. Il donnait des cours à quelques élèves seulement et à 12 ans (le plus jeune et de loin) j’ai pu le suivre pendant des années, presque jusqu’à mon service militaire. Sans m’étendre, par la suite, j’ai pu pratiquer le karaté (un peu), le Yosekan Budo, l’Aïkido et un peu le Viet-vo dao. Aujourd’hui, après avoir été très atteint par des blessures aux genoux (sans rapport direct avec les arts martiaux) je me suis rabattu sur le Taï Chi Chuan, discipline que je pratiquais différemment dans mes cours de Kung-fu.
C’est surtout le Kung-Fu qui m’a apporté en premier "l’esprit" des arts martiaux. Les enseignements étaient à la fois philosophiques et pratiques, cela ne plaisait pas à tous et il y avait autant d’arrivées dans le groupe que de départs.
Arts martiaux… c’est un art de se battre ?
En fait oui. Le but affiché est de vaincre son adversaire, rapidement, et de le mettre hors d’état de nuire ( ce qu’oublient beaucoup de compétiteurs dans les disciplines actuelles). Cela veut dire le tuer s’il n’y a pas d’autre solution, mais éviter de le faire si c’est possible (je sais, ça n’a pas l’air cool comme ça).
Pas d’autres solutions, signifie que l’adversaire (un ou plusieurs) représente un danger mortel pour soi ou des gens que l’on doit protéger.
La première année de Kung-fu était décourageante, il fallait renforcer son physique, courir avec des poids aux pieds et gagner en précision… pour pouvoir au moins fuir le combat ! le maître disait : "Si ce n’est pas ton combat, si tu ne l’as pas choisi et que personne d’important n’est menacé, alors il n’y a pas de honte à fuir un combat que tu n’as pas choisi".
Puis sont venues les techniques, les "formes" (les katas en japonais, notre maître traduisait tout en français, je ne sais même pas comment ça se dit en chinois), la concentration et la respiration pour focaliser l’esprit dans un état naturel et faire circuler l’énergie dans son corps (le Chi ou Ki).
À partir de ce moment, plus personne ne s’en prenait à moi physiquement, ni à l’école ni ailleurs, sans que j’aie eu conscience de changer d’attitude.
Pourquoi est-ce un art ?
C’est un art parce que nous sommes obligés de changer physiquement et mentalement pour que chaque mouvement soit parfaitement exécuté et approprié à la situation.
Comme un peintre doit maîtriser sa technique pour pouvoir s’exprimer, l’artiste martial doit aussi maîtriser son corps, ses émotions son mental, son attention.
De même qu’un musicien fait ses gammes, l’artiste martial doit continuer de s’entraîner en dehors des cours, c’est un chemin de vie.
De même qu’un sculpteur doit maîtriser la force de ses coups et leur direction en fonction du matériau pour faire émerger une œuvre dont il a seul la vision, l’artiste martial doit s’adapter et contrôler sa force, son tempo, pour pouvoir régler sa "danse" avec ses adversaires et développer son propre style, celui qui correspondra à sa nature, et le rendra imprévisible.
Enfin, comme tout artiste, il continuera d’évoluer et d’inventer en fonction de nouvelles techniques ou de nouveaux dangers.
Et ça apporte quoi ?
Cela affute le corps, aide à maîtriser l’esprit et développe l’attention.
Toutes ces qualités se retrouvent dans les yogas, la méditation et dans les entraînements spirituels. Je pratique la méditation depuis plus longtemps encore que les arts martiaux, et je vois les rapports intimes qui existent entre les deux. Les arts martiaux ont l’avantage d’inclure le physique et ses dimensions énergétiques dans la pratique. Ils ont l’avantage aussi de pouvoir être confrontés à des adversaires réels ou fictifs, ce qui permet de ne pas s’illusionner sur ses propres accomplissements.
Ces qualités qui sont développées dans différentes spiritualités viennent baigner les pratiquants, et pour certains, la fonction va créer l’organe. Ainsi, il est courant de voir de grands maîtres s’investir dans la spiritualité après avoir mené une vie de combats.
C’est plus rare à notre époque où les arts martiaux sont davantage pratiqués comme un sport qu’un art, mais cela existe pourtant encore chez certains pratiquants.
Rappelons-nous que le Kung-Fu a été mis au point par des moines, ils devaient être les premiers à voir ce qui semblait irréconciliable dans cette pratique et la leur, pourtant, parce que les arts martiaux font appel aussi à ce qu’il y a de plus primaire dans l’être humain, sans le rejeter, mais en le transformant, cette pratique est un réel facteur d’évolution vers le bien.
Et puis comme disaient les Romains "Si vis pacem para bellum".
Autre chose…
Les connaissances des arts martiaux sont transposables à tout type de combat. Cela signifie aussi qu’on est un meilleur militaire, tacticien, stratège, parce qu’on est adaptable, que l’on raisonne et que l’on continue de s’améliorer. Ceux qui s’y intéressent sur le plan d’un conflit entre groupes ou pays devraient s’en convaincre en lisant les très anciens ouvrages de Sun Tzu "L’art de la guerre" et de Myamoto Musashi "Le traité des cinq roues", ainsi que de s’intéresser à la vie légendaire de ce samurai-ronin exceptionnel.
J’ai dit le principal et bien d’autres choses pourraient encore être développées. Bonne pratique à tous, bonne transformation en meilleurs êtres humains, et je souhaite que la paix vous évite de mettre vos connaissances martiales à l’épreuve.
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