trefle 4 feuilles

Les superstitions

Il y a plusieurs aspects de la superstition. Les lieux communs ou les phrases toutes faites engendrent le même genre de croyances que les superstitions.

Les superstitions.

avril 2020

Il y a plusieurs aspects de la superstition.
Ce peut être un aspect ritualiste : faire ceci de telle façon provoque cela.
Un aspect de malédiction liée à un phénomène ou objet : voir ceci se produire porte malheur, ou est le signe de telle chose négative.
Un aspect de bénédiction ou de protection : garder sur soi tel objet protège du malheur ou porte bonheur.
Tous ces aspects pourraient être vrais, mais ce qui en fait une superstition est l’absence d’explication rationnelle s’appuyant sur des connaissances de l’époque considérée. Une "puissance surnaturelle" est ainsi évoquée pour faire le lien entre la cause et l’effet, qu’elle soit personnifiée ou non.

Les traditions populaires résument en des phrases simples les actions à observer ou à éviter selon le cas.
– Dire "corde" sur un bateau porte malheur.
– Mettre du pain sur le dos porte malheur.
– Trouver un trèfle à quatre feuilles porte bonheur.
– Avoir une patte de lapin sur soi porte bonheur.

Enfin, l’affect de la personne elle-même peut créer sa propre superstition. Un militaire n’osant aller au combat sans un objet-fétiche particulier. Un sportif répétant comme un rituel ce qu’il avait fait lors d’une précédente victoire. On est proche de la "superstition du pigeon", étudiée par Burrhus Frederic Skinner1.

Dans tous les cas, ce qui fait la superstition c’est l’ignorance du mode d’action.
"Donner la couverture d’un malade à un homme saint lui portera malheur" n’est plus une superstition à notre époque.

L’ignorance peut être l’incapacité de comprendre pour celui qui reçoit la maxime, parce que ce serait trop long ou hors de sa portée de lui expliquer les causes (On ne dit pas "corde" sur un bateau, car autant dire "truc", chaque bout (cordage) doit avoir un nom précis pour agir rapidement avec efficacité). L’ignorance peut être du côté de celui qui transmet cette maxime, dans ce cas, il peut en oublier le contexte : "recevoir des œillets porte malheur", contexte du spectacle uniquement et pour des raisons avérées ( ces fleurs étaient les moins chères à une époque, venant donc du producteur comme encouragement et non du public ).

Tout en étant portée par l’ignorance, la superstition est fortement imprégnée de la culture et de l’époque ou elle apparaît. Ainsi, la médaille d’un saint chrétien apportera une protection en relation avec la vie de ce saint.
Parfois, certaines superstitions peuvent fonctionner, il existe donc un moyen d’action réel, mais inconnu, ou mal maîtrisé ( planter lors de certaines phases de la lune ).

Enfin, il existe des croyances qui ne font pas appel à un mode d’action paranormal, ignoré ou surnaturel, mais qui sont partagées comme des maximes que l’on ne remettra jamais en cause par une réflexion.
Ce sont les lieux communs, formés comme les superstitions de maximes et de phrases qui, à force d’être répétées par le plus grand nombre, semblent des vérités indiscutables.

Certains de ces lieux communs et dictons sont anciens, et proviennent d’une mauvaise compréhension de l’origine d’une maxime ( "la meilleure défense, c’est l’attaque" : incompréhension de Si vis pacem para bellum2), ou sont parfois métaphoriques ( le fruit ne tombe pas loin de l’arbre ) , ou encore sont créés pour des besoins de manipulation et répétés et transmis jusqu’à faire office de vérité partagée et donc indiscutable, en associant des causes et effets déconnectés sur le plan réel, mais ayant de fortes répercutions émotionnelles :
– Les valeurs humanistes de la gauche ( réquisition d’attributs, exclusivement sur un seul système politique ),
– Égalité homme-femme, au lieu de "égalité des droits homme-femme" ( éluder volontairement une partie de concept pour introduire une autre signification et ouvrir la voie à une adhésion motivant une action ),
Etc..

Les systèmes de phrases, lieux communs, maximes et dictons "viraux" tirant leur légitimité du partage le plus vaste possible est très proche de la superstition et très utilisé à notre époque où la communication est très rapide, où la vérité n’est pas cachée, mais noyée dans le bruit et où il faut donc à la fois fournir un effort, avoir la motivation et une compétence intellectuelle suffisantes pour analyser et rechercher cette vérité.

Le lieu commun à l’avantage de ne pas faire état de forces incomprises ou surnaturelles et manipule ainsi les plus croyants comme les plus incroyants.
Les politiques, les publicitaires, les banques, les entreprises, et même les institutions scientifiques, en usent et en abusent afin de garder leurs membres dans la certitude de faire le bon choix. Naturellement, les charlatans en usent aussi avec compétence.

Comment ne pas être manipulé par la superstition ou les lieux communs ?
Soyons clairs : c’est impossible, la manipulation existe dans notre équipement intellectuel de base et dans nos modes de communication, et la première personne à nous manipuler, c’est nous-mêmes.
Mais face aux maximes toutes faites, aux superstitions, aux lieux communs, gardez une âme d’enfant : demandez-vous POURQUOI ? Et n’acceptez pas de réponse d’adultes comme "tout le monde sait ça", "c’est comme ça", "ça a toujours été comme ça".
CHERCHEZ par vous-même et bousculez vos propres convictions, cherchez les causes, il ne s’agit pas d’avoir raison, il s’agit de rechercher la vérité.

Pour finir (enfin) sur ce sujet, ce n’est pas parce qu’une proposition ne repose sur rien de concret qu’elle est forcément fausse. Certaines maximes sont vraies, d’autres fausses. De même que certaines démarches et certains raisonnements justes basés sur des faits réels peuvent amener à de fausses conclusions, simplement parce que l’un des éléments est inapproprié ou manquant.

Bonne réflexion à vous et n’oubliez pas que :
Pierre qui roule au pied du mur, voit le maçon se retirer une épine du pied droit parce que ça porte malheur s’il marche dans de la crotte de chat noir en passant sous une échelle.


  1. ‘Superstition’ in the pigeon. Journal of Experimental Psychology, 38(2), 168–172. ( https://doi.org/10.1037/h0055873

  2. Si tu veux la paix, prépare la guerre : en se montrant fort et préparé, un ennemi hésitera à nous attaquer, et s’il le fait, nous aurons rapidement le dessus. 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *